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Quel volume d’entraînement faut-il pour provoquer l’hypertrophie musculaire ? Voilà une question que je trouve passionnante.
Vous avez entendu parler de bodybuilders qui passent 3 à 4 heures dans une salle d’entraînement. Si vous en faisiez autant, auriez-vous un physique comme celui d’Arnold? Mais si vous analysez le temps d’entraînement total, vous constaterez que la majeure partie est consacrée au repos et non pas au travail musculaire. Dans le même ordre d’idée, le temps que les joueurs de football consacrent effectivement au jeu ne correspond pas à la durée totale du match mais plutôt à plusieurs minutes.
Quelle est la durée idéale d’une séance de musculation ?
Combien de temps faut-il donc passer à la salle pour développer la masse musculaire de manière significative? Quelques minutes à peine! Vous vous dites probablement que j’ai perdu la raison et pourtant … on peut obtenir de plus gros muscles en consacrant apparemment peu de temps à les exercer.
Un entraînement en résistance très soutenu peut augmenter la masse musculaire en modifiant la synthèse et la dégradation des protéines. En effet, si la synthèse est renforcée, la dégradation diminue et si elle est plus importante que la dégradation, on a augmentation des protéines musculaires.
Contraction excentrique et synthèse protéique
Cette question a peut-être été étudiée au mieux en utilisant sur des rats un modèle intéressant de « musculation. » Des scientifiques de l’école de médecine de l’université du Texas à Houston ont provoque des contractions involontaires des muscles jambier antérieur et jumeau chez un groupe de ces petits quadrupèdes. Grosso modo, ils ont relié les rats anesthésiés à un appareil déclenchant les contractions musculaires par stimulation électrique. Ce modèle est relativement facile à contrôler pour la longueur, la durée et le type de contraction ainsi que pour le nombre de reps; il était donc aisé de définir les paramètres susceptibles de contribuer au développement de la masse musculaire.
Les chercheurs ont ensuite examiné les différences de réaction entre le jambier antérieur et le jumeau, soumis simultanément à des stimulations électriques tous les trois à quatre jours, pendant 10 semaines. Schématiquement, chaque muscle servait de résistance à l’autre: tandis que le jumeau effectuait un travail concentrique (positif), le jambier antérieur effectuait un travail excentrique (négatif).
Chose étonnante, le jumeau n’avait pas grossi: pas le moindre développement au bout de 10 semaines, avec 192 contractions réalisées tous les trois ou quatre jours! Bizarrement, le taux de synthèse protéique avait augmenté de 50% dans le jumeau avec à peine huit minutes de durée totale de contraction. Mais pourquoi n’y a-t-il pas eu prise de volume si la synthèse protéique avait été décuplée à ce point? Eh bien, je pense que cela montre qu’il n’y a pas que la synthèse protéique qui intervienne quant il s’agit de faire du muscle.
D’un autre côté, le jambier antérieur a présenté une augmentation de volume de 16% à 30% à l’issue du même régime d’entraînement de musculation (sauf que les contractions étaient excentriques). Les auteurs de l’étude ont pensé que la différence de gain de masse entre le jumeau et le jambier antérieur a peut-être été due au fait que ce dernier était soumis à des résistances relativement plus fortes (comme on s’y attendrait dans un travail excentrique.) En fait, une minute de contractions excentriques a suffi pour majorer la synthèse protéique de 30% alors que huit minutes de contractions concentriques l’ont augmentée de 45% (comme dans le cas des contractions concentriques du jumeau). Ainsi, dans ce cas, la synthèse protéique semblait effectivement faire une différence. Soulignons encore une fois que cette synthèse n’est pas la seule raison du développement musculaire. Dans cette étude particulière, le type de contraction (positive ou négative) a probablement joué un rôle important.
Tout ceci indique que:
- l’augmentation de la durée des contractions concentriques n’entraîne pas forcément des gains proportionnels en masse musculaire;
- il suffit d’une minute « d’entraînement » pour obtenir une augmentation significative de la synthèse des protéines;
- pour le muscle stimulé de cette manière, les contractions excentriques devraient produire plus de volume musculaire que les contractions concentriques; et .
- une majoration de la synthèse protéique ne garantit pas un gain de masse musculaire. Au contraire, il semblerait qu’il y ait une certaine interaction entre des modifications du métabolisme des protéines, les blessures musculaires (plus fréquentes dans le cas d’actions musculaires excentriques) et la libération de facteurs de croissance qui contribuent au développement musculaire.
Quelle est la limite naturelle en musculation ?
Quelle information pratique peut-on retirer de tout ceci? D’abord, des entraînements plus longs n’induisent pas obligatoirement une augmentation proportionnelle de la masse musculaire. Bien sûr, vous passez plus d’une minute à la salle sur des appareils de musculation, mais le temps effectif que vous consacrez au travail d’un muscle particulier n’est que de quelques minutes. Par exemple, si vous faites un total de huit séries de huit reps pour les pectoraux et que chaque rep dure quatre secondes, cela fera – en tout – une durée de contraction d’un peu plus de quatre minutes.
Je dois ajouter que l’étude sur les rats a bien montré que travailler davantage (faire plus de contractions) était mieux mais seulement jusqu’à un certain stade au delà duquel les muscles cessaient de se développer. On arrive donc à un point où le rendement baisse mais ce point se situe probablement différemment selon les individus.
Attention cependant: ces recherches ne signifient pas que vous puissiez délaisser la phase concentrique de vos reps. Les études montrent assez clairement que vous tirerez le maximum de profit de vos efforts en vous concentrant pareillement sur les deux types de contractions. Assurez-vous simplement que vous contrôlez la partie ; négative et vous optimiserez réellement le développement de vos muscles.
Conclusion? Pour la plupart d’entre nous qui ne faisons pas de compétition et ne sommes pas l’élite des athlètes de force, passer des heures et des heures dans une salle de musculation risque d’être une perte de temps. D’un autre côté, si en consacrant un peu plus de temps à l’entraînement, vous gagnez ce 1% supplémentaire de masse musculaire et que vous êtes compétiteur de haut niveau, alors ce sera peut-être du temps utilisé à bon escient.